vendredi, 27 of décembre of 2024

Pile ou face, ou Pile et face, ou ?…

Pas facile de réussir à mettre en place une Économie Distributive quand on sait qu’une épée de Damoclès est accrochée à un fil au-dessus de notre tête. Personnellement je ne suis pas très optimiste sur notre très proche avenir. J’espère bien me tromper, mais j’ai bien l’impression que nous nous plaisons à faire comme si de rien n’était, dans l’espoir qu’en ne regardant pas le danger en face il passera à côté. S’il y a bien une chose que l’être humain a apprise, c’est à faire l’autruche. Peut-on vraiment croire que l’orage est passé et que tout va « redevenir comme avant » avec une couche de « croissance verte » ? Peut-on parler de reprise sans rougir quand on sait que seule l’économie spéculative a rebondi grâce aux fonds publics tandis que le chômage, les faillites privées et d’entreprises, les défauts de paiement augmentent ? Peut-on être optimiste face à une élite mondiale dont l’action principale consiste à masquer aux peuples par des jets de poudre de perlimpinpin son unique souci de sauver le système et les intérêts dominants qu’il nourrit ?

Mais qu’est-ce que j’en sais moi-même ? Suis-je plus malin que les autres ? Une chose m’a particulièrement interpellé en 2009. Combien nous sommes prisonniers de la dualité. Ce que je dis là n’est pas un scoop, n’est-ce pas ? La dualité est inévitable puisqu’elle fait partie de notre nature. Pas de lumière sans obscurité, pas de haut sans bas, pas de vérité sans mensonge… Mais quel est le bon côté de la pièce ? Celui qui peut nous apporter le bonheur… Pile ou face ? Le côté du bien sans nul doute ; oui mais encore, le bien, il est du côté pile ou du côté face ?

C’est cette saga de la grippe H1N1 qui a mis en lumière pour moi combien il est difficile de se faire une opinion. N’est-ce pas paradoxal ? Il y a peu de temps encore, l’homme devait avoir bien du mal à faire des choix conscients parce qu’il manquait cruellement d’information. Mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Allez sur internet, posez une question et on vous annonce 175000 pages de réponses. Des chaines de radio et de télé vous donnent l’actualité en temps réel 24h sur 24. L’information circule à la vitesse de la lumière… Oui mais quelle information ? Celle qui défend pile ou celle qui défend face ? Car il semble qu’elle soit fortement orientée pour ne pas dire manipulée dans certains cas. Les médias grand public (indépendants? Hum, hum – « pardon j’métouffe ») ont déversé la version des autorités, n’utilisant la controverse que pour mieux enfoncer le clou du politico-commercialement correct, tandis que sur internet se développait la controverse allant jusqu’à dénoncer une stratégie d’éradication de la moitié de la population terrestre. Alors, à quel saint se vouer ? Car bien sûr chaque camp a ses spécialistes, ses références historiques, scientifiques, ses preuves irréfutables.

Et puis voilà que dans un autre domaine, celui du réchauffement climatique, explose une bombe. Des pirates informatiques ont pénétré les ordinateurs du Climate Research Unit (CRU – C’est le laboratoire scientifique qui alimente le GIEC en analyse de données – le GIEC est le groupement international qui réunit 2500 savants du monde entier sous l’égide de l’ONU autour de la question du climat). Ces pirates ont récupéré et mis à disposition du monde entier sur internet des milliers de fichiers et de mails contenant les échanges privés du groupe de scientifiques. Pourquoi ont-ils fait cela ? Parce que le CRU refuse systématiquement de transmettre à d’autres équipes scientifiques les données à partir desquelles il fonde ses analyses et ses rapports. Or dans ces emails, les scientifiques du CRU laissent transparaître de nombreuses contradictions concernant les données récentes qui infirmeraient la théorie du réchauffement planétaire causé par l’activité humaine. Le Directeur du CRU, le Pr Phil Jones, confirme que les fichiers sont bien sortis du CRU mais il minimise les informations qui « hors contexte, ne signifieraient pas vraiment ce qui est écrit. D’autres nombreux scientifiques éminents commencent à parler CLIMATE GATE. Puis nous apprenons que le Pr Phil Jones serait suspendu de ses activités pour ne pas gêner le cours de l’enquête de sécurité. Enfin, il apparait que tous les fichiers à partir desquels le CRU a calculé les courbes du réchauffement climatique pour le GIEC ont été détruits. Quelle crédibilité peut-ton donner à des rapports dont les données de base n’existent plus ? Pas très professionnelle comme démarche scientifique… Et tandis que le « Climate Gate » fait fumer les ordinateurs des internautes, le silence des médias et des journalistes est remarquable ; ils couvrent le CRU… « rien de grave »…

Dans ces deux cas, la différence entre ce qui est véhiculé sur les médias (radio, télé, presse) et celle qui circule sur internet est frappante. Qui croire: pile ou face ? Cette histoire de réchauffement climatique ne serait-elle qu’une fantastique manipulation pour forcer les peuples à accepter des contraintes, des impôts, des contrôles, des restrictions de libertés dans le seul but de renforcer la domination et la fortune de ceux qui l’ont déjà ? N’est-ce qu’un fait divers monté en épingle par quelques amoureux du scandale ou par quelque intégriste de la non responsabilité humaine dans le phénomène du changement climatique ? Alors, Grippe ou pas grippe ? Dangerosité ou innocuité du vaccin ? Réchauffement climatique ou non ? Responsabilité humaine ou non ?

Une chose me paraît claire. D’où qu’elle provienne, l’information n’est pas objective. Elle sait en prendre la forme pour mieux persuader, mais ce n’est qu’illusion. Que voulez-vous, c’est la rançon de la gloire: sa puissance, son omniprésence, son immédiateté, la performance des techniques de communication sont telles qu’elle est devenue une arme stratégique au service de causes sous-jacentes commerciales ou idéologiques. Faut-il s’en offusquer ? Car si je veux être honnête, je ne peux que constater que lorsque je la reçois, j’ai tendance à adopter une attitude bienveillante à l’égard de celle qui conforte mes opinions tandis que je me cabre face à ce qui vient les chatouiller. Comment, dans ces conditions, puis-je attendre de la société qu’elle me délivre une information pure alors que celle que je véhicule moi-même est teintée ? Est-ce que je cherche à nuire ? Oh que non, je veux le plus grand bien pour tous ; mais pour y parvenir je m’appuie sur mes convictions, mes croyances, mes connaissances, mes expériences… Ajoutez à cela une dose de nécessité pour obligation de devoir gagner ma vie (et donc quelques intérêts à défendre), et voilà les circuits de ma pensée qui disjonctent naturellement à certains endroits tandis qu’à d’autres ils se renforcent. Je fais comme tout monde, quoi… Et le monde m’offre une caricature de ce qui se passe en moi.

Sommes-nous donc condamnés à choisir tant bien que mal entre pile ou face et lutter pour faire triompher le côté que l’on aura adopté ? Imaginons un instant que cela soit possible. Je prends ma pièce, une lime, et je frotte énergiquement jusqu’à ce que l’autre côté n’existe plus… J’y suis presque… regardez, plus que l’épaisseur d’une feuille à cigarette. Encore un ou deux coups et… Oups ! Plus rien. L’autre côté a bien disparu mais le mien aussi. Absurde ? Oui, mais c’est pourtant le jeu auquel on joue à longueur de temps. La dualité qui opère en nous nous pousse à croire que le bonheur auquel nous aspirons tous si fort n’est possible que lorsque le bon côté (le nôtre bien entendu) aura triomphé du mauvais. Mais qu’appelle-t-on bonheur au fait ? Ne serait-ce pas l’état que je ressentirais si enfin je n’étais plus tiraillé entre pile ou face ? Si pile et face étaient confondus ? Et si la dualité n’existait que pour nous ramener à l’unité, là où pile et face ne font plus qu’un. Là, je vais peut-être faire rigoler plus d’un d’entre-vous : ma conviction (mais ce n’est que ma conviction… donc teintée…) me dit que l’unité est notre nature profonde. Celle à laquelle nous donnons le nom de bonheur, ou plus précisément d’amour. Non ! Pas l’amour conditionnel (je t’aime parce que tu corresponds aux critères de ce qui est aimable sur le côté de ma pièce) je parle de l’Amour sans condition, celui qui me rend capable d’accueillir la différence. Balivernes que tout cela ! Comment serait-il possible d’aimer le meurtre, le vol, la violence, la haine… Non je ne parle pas d’aimer l’acte, mais l’être qui le commet. Celui qui, si éloigné de sa nature profonde par les détours de la vie, exprime tout sauf l’amour.

Bon! C’est peut-être moi qui suis fêlé. Mais une chose me frappe. L’humanité explore depuis la nuit des temps la lutte du bien contre le mal au nom de Dieu en premier, du bien, de la liberté, de la justice, allez !… Soyons « tendance », disons au nom des « valeurs républicaines ». Et nous en sommes toujours à lutter, à pointer de chaque côté « l’axe du mal ». Notre planète Terre à force de coups de limes de part et d’autre devient épaisse comme une feuille à cigarettes. Dites-moi, est-ce intelligent de continuer ? Malraux disait que « le XXI° siècle serait spirituel ou ne serait pas ». Je le crois ; mais attention ; spirituel ne veut pas dire religieux. Plus de lutte entre pile ou face mais quête du point où pile et face se réconcilient, peuvent s’épouser, se fondre. Moi, c’est la piste que j’ai envie d’explorer. Il n’y a aucun risque puisque de toute façon la voie « traditionnelle » est plus que bouchée. Seulement voilà, quand je me vois réagir à l’information véhiculée par l’autre côté de la pièce, je me dis que j’ai du pain sur la planche avant d’atteindre le point de non dualité. Tant pis, ça demandera ce que ça demandera mais je crois que ça vaut le coup.

Et si les champions de l’Économie Distributive, de l’altermondialisme, du libéralisme… réussissaient à enterrer la hache de guerre et à faire grandir en eux l’intelligence du cœur, celle qui saura leur dire que la vérité n’est ni sur pile ni sur face… et qui sait… sentiront-ils leur cœur envahi par une paix inconnue, une compassion nouvelle où les ronces, qui bordent encore leur chemin et les griffent, se changeront en massifs de fleurs ?

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Philippe Derudder

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publié le 21/04/2010


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