samedi, 23 of novembre of 2024

Dividende universel en Alaska

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Du côté des pays « riches », l’Alaska a ouvert la voie, il y a 50 ans, certes avec des options très éloignées de l’Économie Distributive, à des redistributions de richesse par dividende universel.

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Les grandes contrées nordiques de l’Alaska sont peu peuplées (650 000 habitants) mais connaissaient le plus fort taux de chômage et le plus faible niveau de croissance des USA. Le pétrole assurait environ 90 % du revenu de l’État.

Au milieu des années 1955, Jay Hammond, maire conservateur du petit port de pêche Bristol Bay, proposa qu’une taxe de 3% soit prélevée sur les prises de pêche pour alimenter un fonds public, qui serait redistribué entre tous. Il lui fallut 5 ans pour convaincre la population et faire de Bristol Bay la municipalité la plus riche du pays1.

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En 1969, l’Alaska a mis aux enchères 164 droits de forage sur des terres qui appartenaient à l’État, ce qui a généré des revenus équivalents à environ 8 budgets annuels. Le produit de ces enchères a rapidement été consacré à des investissements, notamment en infrastructures. « Les gens ont vite estimé qu’une part importante des fonds avait été gaspillée »2 et l’idée que tous les habitants de l’Alaska devraient recevoir une partie des futures recettes pétrolières s’est largement répandue.

Devenu gouverneur de l’Alaska, Jay Hammond proposa son concept à l’État entier, mais cette fois à partir des ressources en hydrocarbures sur lesquelles une dîme serait prélevée pour alimenter le fonds public.

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En 1976, deux tiers des citoyens ont approuvé par référendum un amendement à la constitution qui protège le fonds d’éventuelle future « rafle » par une législature peu scrupuleuse. L’Alaska Permanent Fund Corp (APFC) est devenu opérationnel en 1982.

Ses objectifs sont multiples : sociaux, économiques et fiscaux. Subvention des familles à revenus faibles, correction des déséquilibres économiques, soutien des programmes d’éducation.

Financièrement, il est géré en vue de réaliser des rendements élevés en limitant les risques, et en favorisant la transparence pour accroître la responsabilisation (la gestion est expliquée sur le site internet du fonds3).

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Au début, l’APFC percevait entre 25 % et 50 % des recettes des gisements. Une partie était distribuée à la population, l’autre était réinvestie en actions, obligations et en immobilier. Depuis 1998, l’essentiel des revenus de l’APFC provient du produit de ces placements et non plus du pétrole. La cagnotte de 24 milliards de dollars ainsi constituée est donc dépendante de l’évolution des marchés, de même que le dividende touché par les habitants de l’Alaska.

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Il est versé aux résidents permanents (les habitants qui y passent effectivement l’hiver) en une seule tranche à Noël. Égal pour tous, il avoisinait les 300 $ par habitant dans les années 80. Il a bondit à 3269 $ en 2008 puis est redescendu à 1305 $ en 2009 et à 1281 $ en 2010. Cela représente un mois d’un petit salaire local. En sachant qu’il n’y quasiment plus aucune autre allocation de la part de l’État (ni chômage, ni allocations familiales).

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Un membre de l’AIRE4 témoigne à son retour d’Alaska : « je n’ai trouvé que des gens contents. Les travailleurs apprécient la prime et savent qu’il leur appartient de s’occuper de leurs assurances (maladie, accidents et autres). Les riches disent en plaisantant qu’ils rendent l’argent avec leur impôt fédéral. Les saisonniers, qui gagnent bien leur vie, n’envisagent pas de devenir résidents permanents pour une si petite somme. » Il complète : « le pays n’a plus aujourd’hui de chômeur, SDF ni vieux, qui préfèrent vivre plus près du soleil ». Effet de la mobilité qui est maintenant beaucoup plus aisée qu’au milieu du XXè siècle ?

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Le dividende universel alaskan n’est pas mirifique, tant sur son montant que sur son financement (placements boursiers), mais il a ouvert la voie d’une redistribution inconditionnelle d’une partie des richesses par revenu inconditionnel.


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Éric Goujot

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1 selon la revue « Fortune »

2 Warrack et Keddie (2002, p. 11)

4 Louis Alliot, membre de l’Association pour l’Instauration d’un Revenu d’Existence, été 2005

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publié dans le n°6 de juin 2011, mis en ligne le 15/12/2011


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